Le sommeil, le rêve et l’enfant

De Marie THIRION et Marie-Josèphe CHALLAMEL (2002)

Mon expérience de maman et de professionnelle m’a appris que le sommeil de l’enfant est un sujet qui questionne voire préoccupe de nombreux parents. C’est pourquoi j’ai décidé de me documenter le plus possible à ce sujet pour vous répondre de mon mieux et vous orienter si besoin. 

Dans cet article je vous propose donc de chroniquer un ouvrage dont j’ai entendu parler lors d’une formation sur le sommeil : Le sommeil, le rêve et l’enfant de Marie THIRION et Marie-Josèphe CHALLAMEL

Marie Thirion est une pédiatre et écrivaine française spécialisée dans les questions de maternité, de parentalité et de développement de l’enfant. Elle a travaillé dans différents hôpitaux en France et a acquis une grande expérience dans le domaine de la santé et du bien-être des enfants. Quant à Marie-Josèphe CHALLAMEL, elle est pédiatre, spécialiste du sommeil et chercheur à l’INSERM, et responsable d’une consultation et d’une unité d’exploration du sommeil de l’enfant à Lyon.

Voici les points que j’ai trouvé intéressants de vous relayer.

I. Comment étudie-t-on le sommeil ?

Tout d’abord, les auteures nous précisent que le sommeil est génétiquement organisé. Il existe différents moyens d’étudier le sommeil. Il est possible de réaliser des enregistrements polygraphiques. Cela revient à dire qu’il y a plusieurs enregistrements réalisés simultanément : l’activité cérébrale, les mouvements oculaires, le tonus musculaire, l’activité cardiaque, la respiration, la capacité d’éveil. Il est nécessaire de les réaliser sur 3 à 5 nuits pour des résultats significatifs et fiables.

Ensuite, vous avez la consultation de sommeil. Pour être efficace, elle demande du temps. 2 à 3 entretiens seront proposés à quelques semaines d’intervalles. De plus, on demande également aux parents de remplir un agenda de sommeil sur une dizaine de jours.

Enfin, il y a l’actimétrie. Il s’agit d’une sorte de grosse montre attachée au poignet ou au bras. Cette dernière enregistre en continue les mouvements de l’enfant.

II. Des êtres cycliques

a) les rythmes

Nous suivons tous des rythmes : le rythme circadien (24H), le rythme ultradien ainsi que le rythme infradien (pour ne citer qu’eux).

Les rythmes ultradiens sont des cycles biologiques plus courts qui se produisent plusieurs fois au cours d’une période de 24 heures. Ces rythmes durent généralement moins de 20 heures et régulent diverses fonctions physiologiques et comportementales.

Un rythme infradien est un cycle biologique qui a une période plus longue que 24 heures, c’est-à-dire que la durée du cycle dépasse une journée (hebdomadaire, mensuel, voire même annuel). Par exemple le cycle menstruel.

b) les signes du sommeil lent et paradoxal

Par ailleurs, dans ce livre vous pouvez apprendre les signes qui vous permettent de différencier le sommeil lent du sommeil paradoxal (ou sommeil actif chez le nouveau-né).

Sommeil lentSommeil paradoxal
Visage inexpressif
Respiration lente et régulière
Pouls lent et régulier
Pas de mouvement oculaire
Tonus musculaire conservé
Activité électrique cérébrale lente et ample

Visage expressif
Respiration rapide et irrégulière
Pouls rapide
Mouvement oculaire rapide 
Absence de tonus musculaire
Activité électrique cérébrale rapide, intense
Paralysie 
Les signes du sommeil lent et paradoxal

Cette lecture nous apprend également que théoriquement la durée de l’endormissement est de moins de 10 minutes (quand tout va bien). Puis nous enchainons des 4, 5 ou 6 cycles de sommeil en fonction de notre âge. Je vous mets le document que je vous avais proposé dans un de mes précédents articles : En finir avec les idées reçues sur le sommeil de votre bébé/enfant. Il peut d’ailleurs être très instructif :-).

De surcroit, nous bougeons environ trente fois par nuit !!! C’est qu’on peut caractérisé par des micro-réveils

Selon les recherches en chronobiologie, nos potentialités les plus basses se situent vers 2/3 heures du matin. Le pic de cortisol produit lors de l’éveil fait en sorte que nos potentialités les plus hautes sont situées entre 5 et 8H du matin. Il s’agit d’une phase active. Celle-ci est suivie d’une phase dite de repli entre 11h et 14h. Mais si savez … cette phase du coup de barre juste après le déjeuner :-). Heureusement une nouvelle phase de haute vigilance nous attend entre 17 et 20H ! 

c) deux horloges internes

Pour conclure ce chapitre, j’ai noté que nous avons deux horloges internes principales. Une régule les fonctions biologiques les plus importantes telles que la température, la fréquence cardiaque, la fréquence respiratoire, la tension artérielle, la sécrétion du cortisol). Cette horloge est modulée par les donneurs de temps. L’autre horloge régule le rythme veille/sommeil en fonction des donneurs de temps. 

A quoi correspondent les donneurs de temps me direz-vous ? Voici quelques exemples : la lumière (principal donneur de temps), la température, les repasl’activité physiquel’activité sociale et les sons …

III.Construction et organisation du sommeil de l’enfant

Tout d’abord, il existe différentes étapes. Des étapes dites de construction et d’autres dites de maturation.

  • Étapes de construction : de 24 semaines d’aménorrhée à 1 mois de vie le rythme cérébral est indépendant de son environnement. D’ailleurs le fœtus connait des périodes d’immobilité ou d’agitation complètement indépendant du rythme de sa mère. Puis, de 1 mois à 6 mois, il y a acquisition progressive des rythmes circadiens. 
  • Étapes de maturation : de 6 mois à 4 ans, de 6 ans à 12 ans et enfin à l’adolescence.

Il existe quatre stades de sommeil pour le tout-petit : le sommeil calme, le sommeil agitél’éveil calme et l’éveil agitéIl n’est pas rare que le sommeil agité soit confondu avec de l’éveil.

un enfant qui sourit dans son sommeil
un enfant qui sourit dans son sommeil

a) De la naissance à un mois

  • le bébé dort beaucoup
  • Il ne différencie pas le jour et la nuit
  • Il s’endort en sommeil agité qui représente 50 à 60 % de son sommeil 

b) De 1 à 6 mois 

  • Il existe une périodicité jour/nuit
  • Le sommeil agité représenterait 30% du sommeil total
  • Les donneurs de temps vont permettre des éveils plus longs en journée et la disparition des éveils nocturnes prolongés

c) après 6 mois

De 6 mois à 4 ans : l’enfant s’endort en sommeil lent. Entre 4 et 12 ans : le temps total du sommeil diminue et la sieste disparait bien souvent. A l’adolescence, les siestes peuvent réapparaitre dans certains cas.

Nota bene : le bébé dort pendant l’accouchement (si tout se passe bien). Il ne se réveille qu’au moment des contractions utérines les plus fortes proches de l’expulsion.

IV. Les six premiers mois de vie de l’enfant

Ce que j’ai noté dans ce chapitre, c’est que chaque enfant dort à sa façon. Et chacun évoluera à son rythme. Par ailleurs, « un enfant en sécurité dort bien » selon les auteures. Le bébé vit en résonance émotionnelle avec ses parents. Pour se sentir en paix, il a besoin de les sentir en paix. Préférons également écouter le rythme de bébé plutôt qu’un rythme sociétal qui ne vous convient pas.

Concernant les tétées nocturnes, préférez le silence, un minimum de lumière et réalisez un change qui absolument nécessaire. Cela aidera bébé à différencier les tétées de jour et de nuit. Après trois mois, lorsque bébé commence à pleurer, ces pédiatres proposent d’attendre un peu avant de se précipiter. 

« Il n’y a aucun intérêt à laisser pleurer un bébé aussi petit, à le laisser seul, sauf à la rigueur pour le protéger des émotions excessives de ses parents ».

J’imagine qu’ici elles font référence au risque du bébé secoué. Ensuite sont décrites des « bonnes » habitudes pour une nuit complète :

  • Lui enseigner l’autonomie 
  • Ne pas se laisser aller au biberon de facilité
  • Encourager les progrès 
  • Mettre le berceau à l’écart

V.Les 1001 questions des six premiers mois de vie de l’enfant

Voici les points qu’il m’a semblé utile de noter :

  • Ce qui fait pleurer les enfants : mange-t-il suffisamment ? mange-t-il trop ?
  • Le besoin de succion : téter donne un sentiment de sécurité, procure de l’apaisement. Au-delà de trois mois, les auteures ne la recommandent plus la tétine surtout lorsqu’elle est utilisée systématiquement pour « forcer au silence ». 
  • L’influence des excitants : alcool, médicaments, tabagisme passif, télévision, excès de sollicitation peuvent influer sur le sommeil du bébé.
  • Les coliques du nourrisson : surviennent vers 3 semaines jusqu’à 3 mois. Elles sont liées à l’immaturité digestive. Proposer massage, bouillote, portage, et rassurer bébé.
  • Toute maladie aigue même légère est susceptible de gêner le sommeil, tout comme certains changements de rythme comme les vacances, les voyages …
  • Il est recommandé d’éviter de devancer ou de répondre trop vite aux sollicitations du bébé à partir de 6 mois afin de lui offrir la possibilité de trouver ses propres solutions d’apaisement
  • Le sommeil et l’équilibre de 6 mois à 15 ans

Pas d’équilibre la nuit si pas d’équilibre le jour … Les auteures vous invitent à proposer des routines apaisantes après avoir identifié les signes de fatigues. Par ailleurs ce que j’ai noté, c’est que le lit doit être associé par l’enfant à la paix et non pas à la menace, ou à la punition. 

VI.Difficultés d’endormissement et réveils nocturnes de l’enfant

Selon ces deux pédiatres, la réponse à cette problématique n’est pas médicale. « Il n’y a pas de maladie à chercher ». En revanche, elles proposent de se poser les questions suivantes : qu’est-ce que mon enfant associe au fait de s’endormir ? quelles sont les conditions nécessaires à son endormissement ? 

  • Lui donner un sentiment de sécurité
  • Trouver un équilibre entre intervention trop rapide et laisser pleurer
  • Rassurer 
  • Expliquer à l’enfant ce qu’on attend de lui

J’attire votre attention sur le fait que dans cette partie du livre il est question d’un « programme de rééducation » auquel je n’adhère absolument pas. Il s’agit pour moi d’une méthode qui ne répond pas aux besoins fondamentaux de bébé et qui peut même perturber davantage le sommeil. Par conséquent, je ne vous le recommande pas.

VII. Cauchemars et hurlements nocturnes

Le livre propose un tableau comparatif pour faire la différence entre cauchemars et terreurs nocturnes. Je vous propose le tableau que j’ai réalisé pour cet article : le sommeil du jeune enfant d’Héloïse JUNIER. (Je vous invite d’ailleurs à le lire 😉 )

 CauchemarsTerreurs nocturnesÉveils confusionnels
Profil Rêve horribleÉveil incomplet Le corps se réveille alors que le cerveau est profondément endormiÉveil incomplet Le corps se réveille alors que le cerveau est profondément endormi
Nom scientifiqueParasomnie du sommeil paradoxalParasomnie du sommeil lent profondParasomnie du sommeil lent profond
ComportementHurle ou pleure après le rêve, donc réveilléHurle, les yeux grands ouverts, transpiration, cœur qui bat la chamade, déplacement possible et/ou langage incompréhensibleGrognement, agitationpleurs, les yeux peuvent être ouverts
ConsolableOui Non Non 
DuréeSe calme rapidementDe quelques secondes à quelques minutesDe quelques minutes à 1 heure
Quand2e partie de nuit1e partie de nuit1e partie de nuit 
FréquenceVariable selon les enfantsUn épisode par nuitPeut se répéter plusieurs fois / nuit
SouvenirsPossible Aucun souvenirAucun souvenir
CausesStress, changements, évènements insécurisantChangement dans le quotidien, stress, fièvre, manque de sommeil, suppression de la siesteRéveil provoqué et/ou brutal, stress, problème de santé, irrégularité des horaires de sommeil
Prévalence ?50% des 3 à 8 ans37% des enfants de 18 mois et 20% de ceux de 30 moisFréquent chez les enfants de – de 5 ans
Différencier cauchemars, terreurs nocturnes et éveils confusionnels

Il est urgent de ne rien faire :-). Les pédiatres encouragent les parents à ne pas intervenir, à accepter de ne rien faire. Concernant les cauchemars, ne niez pas ce que votre enfant vient de vivre. Rassurez-le et encouragez-le à se rendormir. 

VIII. L’enfant qui fait pipi au lit dans son sommeil 

On appelle cela énurésie. Les études ne pointent pas de phase de sommeil spécifique pour son apparition. Les parents peuvent mettre en place un agenda/récompenses avec un soleil pour les nuits sèches et la pluie pour les nuits où l’enfant fait pipi au lit. 

IX.Sommeil et somnifères 

Donner un somnifère à un enfant n’est jamais un geste anodin. Les somnifères sont des composés chimiques qui peuvent être néfastes pour son cerveau encore en construction. Ils peuvent avoir des effets secondaires, dégrader la qualité de l’éveil, créer un syndrome de manque … Bref jamais d’automédication et comme elles le disent si bien dans leur livre, « ne jamais donner (…) le sirop qui reste de son grand frère ». Les dosages peuvent être très différent ! Les somnifères relèveront d’une prescription médicale dans des situations bien précises. Les auteures proposent comme alternatives : l’ostéopathie, la phytothérapie, l’homéopathie ainsi que les câlins, les rituels, les histoires, les massages, les berceuses

X.Les maladies du sommeil de l’enfant

Les maladies du sommeil sont finalement très rares chez l’enfant. 

  • Hypersomnies : dormir trop (et oui ça existe …). C’est l’association d’un sommeil prolongé la nuit et d’une somnolence excessive dans la journée.
  • Apnée obstructive du sommeil (transpiration abondante, ronflement sont deux des signes qui peuvent orienter vers ce diagnostic médical)
  • Mort inexpliquée du nourrisson : rien d’anormal dans 85% des cas 🙁

et pour en savoir plus sur le sommeil :

Conclusion 

Pour conclure, je tiens à rappeler que le sommeil est indispensable à la construction du cerveau, à la croissance, à l’équilibre relationnel. C’est une nécessité vitale absolue. Ensuite, je vous propose les points négatifs et positifs que j’ai trouvé à ce livre :

  • Points positifs : les auteures reconnaissent que le « métier » de parent n’est pas toujours simple tout en apportant des connaissances physiologiques solides. En effet, cela permet de comprendre que le rythme de sommeil du bébé, de l’enfant et de l’adulte est tout à fait différent et même évolutif !
  • Points négatifs : tout d’abord, les approches telles que l’hypnose ou autres techniques de relaxation n’ont pas été abordées. Selon l’âge de l’enfant, elles peuvent se révéler utiles et efficaces pour les problématiques liées au sommeil (sans cause médicale). D’autre part, ce livre est parfois paradoxal. Certains points me paraissent très bienveillants et d’autres ne me semble pas respecter le rythme et les besoins fondamentaux du bébé. Je ne suis pas toujours d’accord avec la notion de « bonne habitude ». Je me dis que chacun fait ce qui lui semble juste et j’imagine que chaque parent fait de son mieux avec les ressources qu’il possède. 

Recommanderais-je ce livre ? à un parent peut-être pas. A un professionnel pourquoi car il peut clairement faire partie de notre culture professionnelle. Pour les parents, je recommanderais davantage les lectures suivantes :

ou encore celui-ci :

Avez-vous déjà lu ce livre ? Qu’en avez-vous pensé ? Comment se passe le sommeil de votre petit ? Sentez-vous libre d’en parler dans les commentaires 😉

Si cet article vous a plu, sentez-vous libre de le partager :-)

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